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L’École à travers le cinéma et la littérature de jeunesse, une mise en abyme pour se former à la transmission des valeurs de la République.

Corinne Vezirian, Enseignante en Histoire, Chargée de mission Laïcité et Citoyenneté INSPÉ Lille HDF - Université de Lille

Si le code de l’Éducation et le référentiel de compétences des enseignants nous rappellent que la mission première du professeur est bien de transmettre les valeurs de la République, il n’en demeure pas moins que la question de l’opérationnalité de cette transmission est souvent interrogée par les futurs enseignants. Comment s’y prend-t-on au quotidien pour faire vivre ces valeurs ? Comment passer de la sècheresse de l’expression parfois sibylline à une réalité qui s’inscrit en classe entre la culture de l’engagement, l’éducation à la citoyenneté et la pédagogie de la laïcité ?

Dans le cadre des modules ou des séminaires, le formateur doit affronter ce hiatus entre richesse et ambition de la mission et réalité de son appropriation. Le parti pris de l’atelier est de proposer deux temps de formation à partir de la littérature de jeunesse et du cinéma.

Il s’agit dans les deux cas de mettre en place des outils de réflexivité à destination des futurs enseignants qui transmettront au quotidien dans leur classe les valeurs de la République.

Le premier temps rappelle que l’utilisation de l’album de jeunesse en Enseignement Moral et Civique constitue un recours pédagogique sécurisant pour les professeurs des Écoles qui interrogent les valeurs et les principes républicains et en particulier la laïcité.

L’analyse d’un corpus d’albums, dans le cadre d’un séminaire de recherche en master révèle la dissonance qui existe entre la définition de la laïcité et celle qui surgit à la lecture des ouvrages. N’y est-il pas en effet davantage question de tolérance ou de « Vivre ensemble » ? Comment la laïcité peut-elle être définie pour des élèves de cycle 2 ? Au final, il semblerait qu’un croisement de lectures avec une triple approche axiologique (liberté, égalité et fraternité) pourrait apporter une contribution intéressante à la compréhension plus fine du principe de laïcité.

La deuxième approche s’attache au questionnement du poids de la représentation de l’École, de ses valeurs et de la posture enseignante au prisme du cinéma de fiction.

Cette mise en abyme impulse la dynamique réflexive. Depuis Topaze de Marcel Pagnol jusqu’aux héritiers de Marie-Castille Mention-Schaar en passant par entre les murs de François Bégeaudeau, il s’agit d’interroger les représentations du métier, pour comprendre ce qui se trame derrière l’acte de transmission. Par l’effet de réel mais aussi par la distance du support, grâce au regard porté à la fois sur l’École, ses valeurs intrinsèques et sur le geste et la parole du professeur, le formateur peut ainsi inviter l’étudiant à analyser la mission qui est au cœur de son futur métier. Au-delà de l’effet miroir, le film de fiction rappelle combien la force de l’image permet de questionner les valeurs éducatives et la place jouée par les enseignants dans l’émancipation et l’autonomisation intellectuelle des élèves.

Former à la transmission des valeurs de la République s’envisage donc ici à l’aide de projections pédagogiques concrètes (utilisation d’albums de jeunesse) et de mises en situations fictives (cinéma) en explorant à la fois le domaine du sensible et celui du raisonnement.

Pour aller plus loin :
https://www.cairn.info/l-ecole-a-travers-le-cinema--9782804708733.htm
https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/10/03/le-cinema-s-engage-sur-les-chemins-de-l-ecole_6144133_3232.html

Retrouvez la conférence inaugurale de la journée d'études "Former et se former à la laïcité" :
  • Alain Frugière, président du Réseau des INSPÉ
  • Dominique Schnapper, présidente du Conseil des Sages de la Laïcité

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